Scène de déluge – Anne-Louis Girodet Trioson

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Anne-Louis Girodet de Roucy, dit « Girodet-Trioson », est l’un des plus brillants élèves du maitre David. En 2006, le public a redécouvert l’artiste grâce à une exposition mondiale qui est notamment passée par le Louvre.

C’est au Louvre, justement, que l’on retrouve la Scène de déluge, l’une des  œuvres les plus frappantes de Girodet. Le déluge est un mythe fondateur répandu à travers les civilisations. Dans la Genèse est écrit que Dieu, réalisant l’impiété et la méchanceté des hommes, décida de détruire toute sa création, à l’exception de Noé et de sa famille, à qui il fit construire une embarcation. Souvent, le déluge est représenté d’une façon gigantesque et panoramique, pour mettre l’emphase sur le déchainement de la nature et la faiblesse des hommes. C’est le cas du Déluge de Géricault par exemple. Ici, la scène est représentée par Girodet dans un cadre réduit, celui d’une famille. L’œuvre de Girodet concerne une scène « de » déluge, et pas une scène « du » déluge. Il s’agit ici du déluge universel, pas à proprement parler du déluge biblique. C’est avec cet argument que Girodet répondit à ses critiques, qui reprochaient au tableau de nous montrer, en arrière-plan, une eau trop transparente, pas assez souillée de sable, de boue et de corps emportés. Malgré son démenti formel, c’est bien l’appellation « scène du déluge » qui continue de se propager, le musée du Louvre lui-même commentant le tableau sous cette appellation.

Le tableau représente avant toute chose une famille, suspendue au-dessus de l’abîme et dont tous les membres sont enchainés les uns aux autres. Il y a l’homme, dans la force de l’âge, le chef de famille qui cherche à sauver les siens. Sur son dos est agrippé un vieillard, son père, tétanisé et faible, qui tient dans sa main une bourse. Ce symbole très railleur dénonçant l’avarice du vieillard a été critiqué en son temps comme « trop recherchée et peu digne d’une scène aussi importante ». Sous le chef de la famille, retenue d’une main, l’épouse, contorsionnée entre le nouveau-né qu’elle retient contre sa poitrine et l’ainé qui, dans un réflexe de survie, s’agrippe à la chevelure de sa mère. Leur sort à tous ne tient qu’à la solidité des restes décharnés d’un arbre. En bas à gauche de la composition ; une femme morte ou agonisante, symbole de ce qui les attend dans le précipice.

 

Le tableau a reçu les honneurs de son temps. Scène de déluge a fait sensation au salon de 1806 et a remporté, en 1810, le concours des prix décennaux face aux Sabines de David, lequel commentera : « Il a été donné à Girodet, dans cet ouvrage, d’unir la fierté de Michel-Ange à la pureté de Raphaël ». Le jury, quant à lui, commentera la gratification comme suit : « Cette scène si touchante et si terrible, en offrant à nos regard ce que la crainte et le danger extrême ont de plus effrayant, ne présente que des mouvements nobles et ce que la nature a de plus pur ».

Sur le même thème du déluge, on retrouve un tableau antérieur de Regnault assez comparable à celui de Girodet, puisque reprenant certains éléments de composition tels que le vieillard porté par le fils et la femme, en contrebas, protégeant son nouveau-né. Filiation étrange, et à ma connaissance inexpliquée.

 

 

Scène de déluge, Girodet Trioson, 1806, Musée du Louvre.

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